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La princesse et le crapaud

Il était une fois une très jolie princesse. Elle avait de longs cheveux qui touchaient presque terre et de grands yeux qui, lorsqu’ils vous fixaient, vous faisaient sentir tout léger. Elle vivait depuis de longues années dans le château de son père le Roi et de sa mère la Reine. Le Roi et la Reine qui l’aimaient très fort, faisaient tout pour lui rendre la vie douce et belle : aucune robe, aucun jouet, aucun cheval, aucun … n’étaient trop beaux pour elle. Elle n’avait rien à faire. Servantes et savants prévenaient le moindre de ses désirs. Pourtant, la jolie princesse était triste. Elle était seule et désoeuvrée. Elle attendait son amoureux depuis si longtemps qu’elle pensait que jamais il ne viendrait. Ses parents l’aimaient tellement qu’ils trouvaient qu’aucun jeune homme n’avait assez de qualités et qu’aucun vieil homme n’avait assez de grâce pour mériter sa main. Les uns après les autres, ils les avaient rejetés. La princesse d’ailleurs n’en avait aimé aucun. La princesse comme les parents, vieillissaient et le désespoir commençait à les envahir . La princesse, comme les parents, pensaient avoir été bénis des Dieux. Mais, maintenant, avec l’âge, ils  se demandaient  s’ils n’étaient pas maudits. Le Roi et la Reine se reprochaient d’avoir raté l’éducation de leur fille à force de lui épargner le moindre effort. La princesse, elle, pensait qu’elle était indigne d’être aimée.

Pourtant, un jour, alors que la jolie princesse se promenait le long des fossés du château, elle aperçut un horrible crapaud. Il était si laid qu’elle s’en approcha. Il était tellement occupé à manger mouches, moustiques et moucherons qu’il ne la vit même pas. Et lorsqu’elle l’interrogea sur ce qu’il faisait, d’où lui venait cet appétit terrible et comment il pouvait se déplacer en étant si gros et encore bien d’autres questions, il ne leva même pas la tête pour lui répondre. Au bout d’un moment, lassé de tant de bruit, le crapaud s’éloigna sans prêter attention à la princesse.

La jolie princesse se dit qu’elle était décidément bien peu intéressante puisque même un crapaud ne l’écoutait pas, ni ne la regardait.

La jolie princesse retourna en pleurs au château. Mais là, le Roi son père à qui elle raconta sa mésaventure, lui expliqua la vie des crapauds, de quoi il vivait et l’importance de leur rôle dans leur confort : s’il n’y avait plus de crapaud, le château serait infesté de moustiques qui les piqueraient partout, de jour comme de nuit. Le Roi manifestait un tel respect pour cet animal si laid que la curiosité de la jolie princesse en fut tout excitée. Elle décida d’en apprendre encore davantage. Elle alla dans la grande bibliothèque du château où elle retrouva la Reine sa mère à qui elle demanda tous les livre sur les crapauds. Aussitôt dit, aussitôt fait, la Reine ordonna qu’on sortit tous les livres et on les empilât sur la grande table de la bibliothèque. Bientôt, la jolie princesse en su plus long sur ce sujet que n’importe qui. Régulièrement, elle allait au bord des fossés et régulièrement, elle discutait avec son crapaud, celui qu’elle avait vu en premier, qui était en fait le chef des crapauds. Le crapaud s’était habitué à cette étrange jeune fille qui posait tant de questions. Il lui répondait posément tout en continuant son travail. Au fil du temps le crapaud paraissait moins laid à la jolie princesse. De son côté, un jour, le crapaud regarda pour de bon la jolie princesse et en tomba amoureux. Il imagina alors toutes sortes de stratagème pour pouvoir l’embrasser : se poster en hauteur sur la poterne du château pour lui sauter dessus, faire semblant de se noyer pour être secouru par la jolie princesse, grimper le long de sa jambe,… Mais, un jour alors que la princesse avait son visage tout prêt de lui, il n’eut qu’à faire un petit saut pour atteindre ses lèvres et y déposer un baiser. La princesse surprise tomba à la renverse. Le crapaud en profita pour se glisser sur elle et lui faire un autre baiser dans le cou. La princesse se surprit à ne pas trouver cela aussi dégoutant qu’elle l’aurait imaginé.

Evidemment, il lui était impossible de tomber amoureuse d’un crapaud. Mais elle aimait beaucoup ce chef qui était si actif, dirigeait avec tant de sagesse son groupe de crapauds et avait une vision si généreuse. Il travaillait au bien commun avec dévouement et sans attendre aucune reconnaissance de personne, même pas du Roi qu’il aidait aussi considérablement qu’une armée de fidèles soldats.

Vous l’avez compris, avec un tel ami, la jolie princesse ne pouvait entretenir d’autres relations, ni tomber amoureuse. Mais ni la jolie princesse, ni le Roi son père, ni la Reine, sa mère, ne s’inquiétèrent car désormais, elle était heureuse. Elle avait un ami à qui désormais elle pouvait se confier, un sujet d’étude qui était devenu un projet car elle avait créé une nurserie pour protéger les bébés crapauds que trop de gens et d’animaux tuaient. Elle avait mis au point une technique d’investigation pour favoriser la connaissance d’autres espèces. Elle était maintenant consultée par des savant du monde entier qui l’interrogeaient sur ses méthodes de travail et sur la vie des crapauds qui étaient en voie de disparition dans bien des 

Et un jour, ce qui devait arriver, arriva, elle tomba amoureuse d’un scientifique qui lui même l’aima éperdument. Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants. La jolie princesse avait compris qu’elle ne désirait pas avant tout un mari mais d’abord un centre d’intérêt qui la passionnerait et donnerait un sens à sa vie. Son père le Roi et sa mère la Reine avaient compris que leur éducation n’était pas en cause et que le bonheur de leur fille ne pouvait, tout entier, dépendre d’eux.

Voir clair en soi, ou connais-toi toi-même, plus facile à dire…

Comme pour l’eau, il faut d’abord remuer un peu la vase pour trouver ce que l’on cherche et puis juste attendre que les éléments se déposent (ou se re-posent) pour y voir clair.



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